A la date de publication de cet article, le 20 mars 2023, l’association R.E.A.C.T. compte 785 familles adhérentes depuis sa création en Décembre 2018. Nos familles membres sont réparties dans toute la France, dans les DROM-COM, et dans plusieurs pays étrangers (Allemagne, Australie, Belgique, Canada, Irlande, Israël, Japon, Luxembourg, Pays-Bas, Roumanie, Royaume-Uni et Suisse).

Cet article est le 2ème d’une série d’articles visant à sensibiliser le grand public sur notre problématique, notre association et nos actions.

Le comportement tyrannique de l’enfant et de l’adolescent, est-il plus fréquent chez le CSP+ ?

Préambule

Le Dr Nathalie Franc et le Professeur Haïm Omer évoquent dans leur ouvrage1 une double vulnérabilité associée au comportement tyrannique :

  • D’une part, les enfants au comportement tyrannique qu’ils rencontrent dans leurs services de soins présentent des troubles psychopathologiques associés.
  • D’autre part, « cette vulnérabilité chez l’enfant semble faire écho à une sensibilité parentale exacerbée aux symptômes de l’enfant ». Ce sont des parents « très sensibles aux besoins de l’enfant, plus informés et instruits que la moyenne, investissant de façon massive leur rôle de parent et leur responsabilité ». Ainsi, les enfants à comportement tyrannique sont « plutôt issus de milieux favorisés ».

Dans un article publié le 29 octobre 2022, basé sur les réponses de parents membres de l’association REACT, nous avons montré des données relatives aux troubles les plus fréquemment associés à ce profil de comportement qui sont en accord avec l’observation des professionnels : le comportement tyrannique serait bien le résultat des troubles pédopsychiatriques sous-jacents2. Afin d’aborder la question de la vulnérabilité parentale, nous avons sollicité à nouveau nos parents adhérents avec un questionnaire qui vise à évaluer leur niveau d’études et leur catégorie socio-professionnelle. Les résultats de ce sondage sont montrés ci-après.

Afin d’aborder la question de la vulnérabilité parentale, nous avons sollicité à nouveau nos parents adhérents avec un questionnaire qui vise à évaluer leur niveau d’études et leur catégorie socio-professionnelle. Les résultats de ce sondage sont montrés ci-après.

Cet article a été créé bénévolement par le bureau R.E.A.C.T. Il est proposé uniquement à titre informatif et il ne saurait en aucun cas se substituer à des conseils ou consultations de nature professionnelle.

 

Niveau d’études de nos parents membres

Le graphique ci-dessous présente le niveau de diplôme le plus élevé obtenu en France par les femmes et les hommes d’un âge compris entre 25 et 54 ans (données INSEE 2020) ainsi que celui déclaré par les parents membres de notre association.

En France, les femmes sont plus diplômées que les hommes. Seules 14,3 % des femmes entre 25 et 54 ans n’ont aucun diplôme ou le brevet des collèges, contre 16,2 % des hommes dans la même tranche d’âge. Elles sont aussi plus souvent diplômées du supérieur : c’est le cas de 47,9 % des femmes contre 40,5 % des hommes.

Bien que ces tendances femme-homme soient conservées chez les parents membres de notre association, les parents adhérents de REACT ayant répondu au questionnaire sont surdiplômés par rapport à la population française dans son ensemble. En effet, sur un échantillon de 307 mamans et 245 papas membres de notre association, seulement 1,3% des mamans et 2% des papas n’ont aucun diplôme ou le brevet des collèges (contre 14,3 % des femmes et 16,2 % des hommes en France). Cette sous-représentation est également retrouvée chez les titulaires d’un diplôme de niveau 3 (CAP, BEP) ou de niveau 4 (baccalauréat, BP). En revanche, 70,7% des mamans et 58% des papas membres de l’association ont un diplôme de niveau 5, supérieur à bac+2, (contre 30,5 % des femmes et 26,2% des hommes, respectivement, dans la population générale).

Catégorie socio-professionnelle de nos parents membres

Selon l’INSEE, en 2021, les catégories socio-professionnelles les plus fréquentes sont les professions intermédiaires (27,2% des femmes et 22,4% des hommes) suivies par les employés qualifiés chez les femmes (23,4%) et les cadres chez les hommes (24,3% des hommes). Les femmes sont plus présentes que les hommes dans la catégorie d’employés (qualifiés ou peu qualifiés), avec 41,1% des femmes contre 11,8% des hommes. En revanche, une sous-représentation de femmes est observée chez les ouvriers (qualifiés ou peu qualifiés), avec 7,6% des femmes contre 30% des hommes.

Les réponses au questionnaire proposé montrent une surreprésentation de catégories socio-professionnelles les plus favorisées chez les parents adhérents de REACT par rapport à la population française. Sur un échantillon de 283 mamans et 249 papas membres de notre association, la proportion des cadres est largement en dessus (43,5% des femmes et 45,4% des hommes) de celle de la population française (18,7% des femmes et 24,3% des hommes). Les artisans, commerçants et chefs d’entreprise sont également surreprésentés au sein de l’association (16,3% des femmes et 17,7% des hommes) par rapport à la population française (4,1% des femmes et 8,8% des hommes). Au contraire, les ouvriers (qualifiés ou peu qualifiés) sont sous-représentés au sein de l’association (0,4% chez les femmes et 4,4% chez les hommes) par rapport à la population en générale (7,6% des femmes et 30% des hommes). La même sous-représentation est retrouvée chez les employés peu qualifiés.

 

Conclusion

Comme indiqué en préambule et dans un article que nous avons publié précédement2, le comportement tyrannique de l’enfant/adolescent est la résultante des troubles pédopsychiatriques sous-jacents. En accord avec le caractère neurobiologique de ces troubles, les études épidémiologiques, notamment sur le TDA/H (trouble de déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité), montrent que ce trouble est présent partout dans le monde, bien que la façon dont la culture affecte l’expression des symptômes, ou la réponse au traitement, soit encore peu étudiée3. On peut donc aisément penser que ces troubles ne sont pas associés à un secteur géographique donnée ou à une catégorie sociale particulière.

Toutefois, comme indiqué en préambule et en accord avec l’observation du Dr Nathalie Franc et du Professeur Haïm Omer dans leur ouvrage1, les réponses de nos parents membres au questionnaire proposé montrent que la plupart de ces parents ont un niveau d’études supérieur à la globalité de la population française et qu’ils appartiennent aux catégories socio-professionnelles les plus favorisées (CSP+). Plusieurs explications possibles, et non exclusives, à cette contradiction apparente sont exposées ci-après.

Tout d’abord, pour expliquer le comportement de l’enfant, il serait réducteur de ne pas considérer l’environnement dans lequel il évolue. En effet, il est plausible que le niveau d’instruction élevé de ces parents joue à leur défaveur et que, face à un enfant dépassé par ses émotions et sa forte anxiété, ces parents puissent être plus enclins à sur-analyser la situation, à essayer d’interpréter, de comprendre… La haute sensibilité de ces parents aux besoins de leur enfant peut ainsi devenir un piège, cette grande attention au bien-être de l’enfant faisant écho aux difficultés associées aux troubles. Il ne s’agit donc pas ici de parents ayant des lacunes en matière d’éducation mais d’un mode de fonctionnement qui n’est pas adapté aux spécificités de l’enfant au comportement tyrannique. C’est pourquoi, la méthode REACT de résistance non violente permet, au travers du repositionnement du parent, d’empêcher la dynamique qui conduit à l’inversion de la hiérarchie familiale.

D’autre part, il est également probable que, comme déjà indiqué dans notre article précédent, il existe un biais d’échantillonnage concernant les familles qui deviennent membres de l’association2 (ou qui arrivent dans les services de soins traitant la problématique spécifique du comportement tyrannique). En effet, il est reconnu que la vulnérabilité socio-économique avant la maladie (au sens large) est un facteur aggravant, tout comme le manque d’informations sociales et la complexité des démarches. Plus précisément en santé mentale, la difficulté d’accès au diagnostic pour les enfants des familles plus modestes représente un frein pour la prise en charge et l’accompagnement. Ces difficultés sont d’autant plus importantes s’agissant du comportement tyrannique, car cette problématique est encore mal connue, voire un sujet tabou. Dans ce cadre, les familles avec un niveau d’instruction supérieur à la moyenne, et appartenant aux CSP+, auraient davantage les ressources sociales et financières leur permettant de creuser et d’avoir accès, non seulement au diagnostic mais, plus largement, aux informations relatives à notre problématique atypique. Cela faciliterait certainement l’arrivée de ces familles dans les services de soins, et également dans l’association, pouvant biaiser, au moins partiellement, les proportions observées dans notre sondage.

D’autres statistiques internes à notre association semblent confirmer ces idées. En effet, parmi 718 parents adhérents ayant répondu à la question : « Comment avez-vous connu l’association REACT ? », les deux réponses les plus fréquemment retrouvées sont « recherche d’information sur internet/réseaux sociaux » (48,5%) et « par un professionnel/par un programme de guidance » (27,4%), ce qui souligne la recherche active d’information de la part de nos parents membres au sujet de leur situation et l’importance de leur présence dans le parcours de soins à l’heure de entrer en lien avec notre association.

Nous pouvons ainsi penser que les difficultés d’accès aux services des soins, et à l’association, pour les familles plus défavorisées retirent certainement des chiffres un grand nombre de familles. Pire, elles ôtent à ces enfants et à leurs parents le chemin vers un apaisement de leur situation. Dans ce cadre, les interventions dans les médias et les actions de communication au sens large sont un moyen précieux pour briser le tabou et faire connaître notre problématique le plus amplement possible. En effet, nous observons une corrélation claire entre nos actions de communication et l’augmentation du nombre de contacts (familles et professionnels) et cette dynamique ne cesse d’augmenter depuis la création de l’association en décembre 20184. A l’avenir, il serait donc intéressant d’évaluer l’évolution de la proportion de parents membres venant de milieux favorisés au fur et à mesure que le tabou associé à notre problématique est levé et que davantage de familles concernées ont la possibilité de sortir de l’isolement dont elles sont victimes.

A ce jour, nous ne disposons pas de données suffisantes pour comprendre le comportement tyrannique de l’enfant/adolescent : quelle est sa prévalence ; quelles sont ses causes, ses retentissements, ses spécificités ; que deviennent ces enfants ? La génération de données fiables permettant de caractériser le comportement tyrannique nécessite des études spécifiques dans la population en général. Une reconnaissance plus large de notre problématique atypique est une condition préalable à la réalisation de ces études.

   

L’association R.E.A.C.T. est engagée dans une démarche collaborative avec les professionnels (sanitaire, social, éducatif, juridique…) afin de faire connaitre et reconnaitre notre problématique atypique. Nous remercions les professionnels qui nous soutiennent ainsi que nos familles membres qui ont accepté de remplir des questionnaires servant à l’élaboration de cette série d’articles.

 

Références
1 – Accompagner les parents d’enfants tyranniques – Programme en 13 séances. De Haïm Omer, Nathalie Franc (2017) ISBN : 978-2-10-076758-8

2 – https://www.association-react.com/2022/10/29/caracterisation-des-enfants-ados-au-comportement-tyrannique/ 

3 – Faraone et al.,(2021) The World Federation of ADHD International Consensus Statement: 208 Evidence-based conclusions about the disorder doi.org/10.1016/j.neubiorev.2021.01.022

4 – https://www.association-react.com/2023/01/02/r-e-a-c-t-fete-ses-4-ans/ 

 

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